Depuis que les crypto-monnaies ont explosé en popularité, leur croissance a été freinée par les régulateurs dans plusieurs pays du monde. Cependant, nul n’a été plus sévère que les institutions de régulation américaines.
Aux États-Unis, les régulateurs sont presque en guerre totale contre tout ce qui touche de près ou de loin aux cryptos. Leur objectif étant de rendre la vie infernale avec des règles de plus en plus strictes. Face à ces difficultés qui ne s’amenuisent pas, une nouvelle astuce se profile : le géorepérage (ou geofencing en anglais).
Il s’agit d’un filtre numérique qui bloque l’accès à certaines plateformes en fonction de la localisation des utilisateurs. Pour les entreprises de cryptos, c’est devenu le bouclier anti-régulations américaines, une sorte de joker pour échapper aux ennuis juridiques.
La grande muraille digitale des entreprises crypto
Les acteurs de la crypto se retrouvent de plus en plus dos au mur face aux régulations américaines. Plutôt que de se laisser submerger par des amendes astronomiques ou de longs procès, elles commencent à considérer sérieusement le déploiement du géorepérage.
1/ As U.S. regulators continue their war on crypto, many founders are thinking about geofencing as a compliance strategy.
It can work, but only if it's done right.
That’s why @dbarabander and I wrote this Practical Guide to Geofencing:https://t.co/utoNy8fRDU
— Jake Chervinsky (@jchervinsky) September 30, 2024
Des entreprises comme Binance et Maker ont déjà adopté cette tactique, construisant des barrières invisibles autour de leurs plateformes pour bloquer les utilisateurs provenant de certaines régions, en particulier des États-Unis.
Le but est de fermer l’accès aux Américains afin d’éviter les tracas légaux, tout en continuant à opérer sur d’autres marchés sans craindre d’être dans le collimateur des régulateurs US.
Les failles techniques du géorepérage : une barrière pas si infranchissable
D’un point de vue technique, le géorepérage est loin d’être infaillible. Les entreprises utilisent principalement les adresses IP pour déterminer la localisation des utilisateurs. Néanmoins, ces données sont trompeuses : elles peuvent facilement se masquer ou se falsifier grâce à des VPN ou des proxys, rendant les barrières digitales inefficaces.
En outre, les adresses IP mobiles sont encore moins fiables, indiquant souvent l’emplacement du fournisseur de services plutôt que celui de l’utilisateur réel. On se retrouve ainsi avec du geofencing percé de failles qui laiss passer des utilisateurs indésirables tout en bloquant parfois ceux qui devraient avoir accès.
Ce dilemme technique expose les entreprises à de nouveaux risques. En se fiant uniquement à des données aussi volatiles, elles se placent en position de vulnérabilité face aux régulateurs, tout en frustrant leurs clients légitimes.
Il ne suffit donc pas de tracer des lignes numériques sur une carte virtuelle ; encore faut-il que ces lignes soient fiables et précises. Les entreprises doivent désormais investir dans des technologies plus avancées pour vérifier la véritable position des utilisateurs, utilisant des données GPS, Wi-Fi, ou des techniques de triangulation mobile.
Une entreprise qui néglige ces améliorations se retrouve à jongler avec des balles enflammées, dans un équilibre précaire entre conformité et accessibilité.
Le prix à payer pour l’emploi du géorepérage
Si le géorepérage offre une forme de protection contre les régulateurs américains, il vient avec un prix élevé, tant financier qu’opérationnel. La mise en place de systèmes sophistiqués de géorepérage demande des ressources considérables : infrastructure technique, serveurs hors des États-Unis, personnel expatrié.
En plus de cela, le géorepérage peut aliéner une grande partie du public cible, notamment les utilisateurs américains, qui représentent une portion importante du marché crypto. Certes, cela les protège des sanctions, mais ça peut aussi entraîner une fragmentation du marché, laissant certaines personnes sans accès aux services qu’elles souhaitent, à cause de ces murs numériques.
En fin de compte, ce qui est vraiment en jeu ici, c’est l’avenir des cryptos. En érigeant des murs numériques, les entreprises crypto s’éloignent de l’idéal fondamental d’un écosystème décentralisé et ouvert à tous.
Elles se dirigent vers un modèle plus segmenté, où les marchés sont déterminés par les régulations locales plutôt que par les besoins des utilisateurs. Cela pourrait marquer le début d’une nouvelle ère de fragmentation numérique, où la promesse d’une monnaie universelle, échappant aux frontières, est sacrifiée sur l’autel des régulations.
Un futur où la liberté que représentait la crypto se retrouve enfermée derrière des barrières de geofencing.
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